Divorce des époux Soolmans

Sep 14, 2015 | Art | 0 commentaires

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Les époux Soolmans, peints par Rembrandt  en 1634 sur deux toiles distinctes, jusqu’ici jamais séparées sont en vente. Mais les deux portraits étant trop chers pour le Louvre, la Hollande devrait alors en acquérir un. Retour sur une polémique qui a secoué le monde de l’art.

Ces deux tableaux sont passés de collectionneurs en collectionneurs, jusqu’à ce que la famille Rothschild en fasse l’acquisition en 1877. Mais en 2013, la baronne de Rothschild décède. Dans sa succession se trouve le couple de Rembrandt, entre autres, dont les héritiers souhaitent se séparer. Le Louvre est approché, les tractations durent un an, sans aboutir : les vendeurs, suivant les estimations des experts, en demandent 160 millions d’euros la paire, une somme astronomique, même pour le plus grand musée du monde (Pour se faire une idée, le Louvre dispose d’un budget d’acquisition de 8 millions d’euros par an, prélevé sur sa billetterie. Il lui faudrait donc vingt ans, sans rien pouvoir acheter d’autre, pour acquérir les Rembrandt, alors que depuis dix ans ans, le musée a pu faire rentrer 1 600 œuvres dans les collections nationales)

Le Louvre finit par décliner la proposition, disant adieu aux Rembrandt. Quelques temps plus tard, le ministère de la Culture annonce qu’il donne son feu vert aux héritiers pour la vente des tableaux à l’étranger. Le musée a approuvé l’avis de son ministère. Au Qatar, une offre aurait déjà été faite. Stupeur générale dans les milieux de l’art : les Rembrandt sont des chefs d’œuvre absolus détenus en France depuis plus d’un siècle et ne devraient en aucun cas en sortir ! Leur seule place est dans un musée : le Louvre ! La position du ministère parait d’autant plus surprenante qu’une loi a été créée exprès pour ce genre de situation : le classement en «  trésor national » d’une œuvre jugée capitale au patrimoine culturel national, interdisant la sortie du territoire pour une durée de trente mois. Le temps nécessaire à l’Etat pour trouver les financements, les négociations pouvant même, si les deux parties ne se mettent pas d’accord, être menées in fine par un tribunal ad hoc.

Pourquoi les Rembrandt n’ont-ils pas été classés trésors nationaux ? Pourquoi n’a-t-on pas voulu se donner deux ans et demi de plus pour trouver une solution ? Pourquoi le Louvre a-t-il donné son feu vert à l’exportation, alors même que le directeur du département des peintures du musée, représentant ses homologues des musées de région, n’y était pas favorable ? En pleine période de crise, le montant aurait-il à ce point tétanisé tout le monde ?

En juillet dernier, devant l’ampleur de la polémique, le cabinet de la ministre a planché sur une solution alternative. La solution de la poire coupée en deux : la France pourrait éventuellement acquérir un des deux Rembrandt, et la Hollande l’autre. Les deux continueraient d’être exposés ensemble, pour une durée de deux ou trois ans, en alternance entre le Louvre et le Rijksmuseum, à Amsterdam. L’avis des Rothschild n’est pas connu à ce jour. En pleine crise existentielle, le couple le plus durable de l’histoire (de l’art) est suspendu à un arrangement à l’amiable.

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