Un jour, un instant

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Lyon, Salle Molière. Jeudi 30 novembre 2017. 20h37.
Juste avant l’entrée du chanteur. Cet instant délicieux où l’on se pose dans son fauteuil en attendant de plonger dans un univers qu’on connait bien, en espérant de la surprise et de l’émotion. Impatiemment. Hier soir, dans la petite et chaleureuse salle Molière de Lyon, que le chanteur adore tant, il y eut des frissons d’émotion, de la douce folie, de l’extrême délicatesse dans les arrangements, une voix, trois voix, des instants drôles et graves et l’intimité toute proche.
La journée du lendemain n’aura pas suffit à défaire ce nuage moelleux et confortable qui nous entourait.
Albin de la Simone, merci.

Un jour, un instant

Rivière de Ternand. Samedi 22 août. 14h32.
Il y a parfois des petits hasards de la vie, inattendus et poétiques. Par exemple, quand une « Demoiselle » (de son vrai nom une Zygoptera) se pose sur l’épaule du modèle en pleine séance photo, juste dans un éclat de soleil. Une heureuse rencontre, inespérée, pour un cliché souvenir…

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Un jour, un instant

Ternand. Chez moi, lundi 20 juillet. 05h54.
Il est très tôt ce matin quand je décide de me lever. En effet, il m’est impossible de fermer l’œil après un réveil à 4 heures et comme mes peintures à l’atelier m’attendent, je fais le choix de les rejoindre, après avoir fait un thé pour commencer cette journée qui s’annonce aussi longue que cette phrase !
Dans l’escalier qui me mène jusqu’à l’étage inférieur, je vois avec étonnement une croix projetée sur le mur. Elle scintille, juste à côté d’un de mes tableaux (période « classique ») sur bois représentant un ange. Cette fragile projection provient d’un lustre que j’ai fabriqué en y accrochant quelques pièces de verre, représentant des cœurs, des croix et des étoiles. Ce matin là, ce sont les premiers rayons du soleil qui décidèrent de jouer avec cette croix, en déposant son reflet sur mon passage. Je pris cette photo juste à temps, car l’image éphémère disparue quelques secondes plus tard… Quel signe m’a-t-on envoyé là ?

croix

 

Un jour, un instant

Ternand, Rhône. Dimanche 24 mai 2015. 21h56.
Le soir est tombé et le gite de la Maison du Chat Perché est enfin prêt pour les prochains hôtes qui arriveront le lendemain en fin de journée. Il y avait une belle lumière ce soir là, alors au moment où je décide de prendre une photo de la terrasse couverte voilà qu’un chat passant par ici se plante en spectateur sur le seuil. Mais ce n’est pas sa maison, alors il restera là, immobile et interrogatif, à regarder les lumières qui scintillent sur cette mystérieuse terrasse avec au loin un ciel bleu, un bleu profond qui est celui de la nuit qui tombe… On l’appelle le bleu nuit.

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Un jour, un instant

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Lamontgie, Puy-de-Dôme. Dimanche 18 janvier. 11h45.
Rouge. Tout est rouge sur la façade de cette maison. La porte du garage, les volets, l’abri des chats, le tour des fenêtres et même les joints entre les pierres. Me voici en pleine observation de cet obsession du rouge, et voilà qu’une mamie ouvre sa fenêtre au premier étage et se met à raconter sa vie. Elle sort de l’hôpital et durant son absence elle n’a pas pu nourrir tous les chats des rues en bas de chez elle. Ce jour là, il n’y en avait que deux, mais elle était désolée de ne pas pouvoir montrer, avec fierté, la bonne dizaine de chats qui logeaient habituellement au pied de sa maison rouge. Peut-être était-elle rouge de colère ?
L’intérieur de cette brave dame est-il rouge lui aussi ? Et si ses fauteuils, ses tapisseries, sa cuisine, ses casseroles et sa vaisselle, ses serviettes de toilette et ses draps étaient aussi de couleur rouge ?
Madame tout en rouge aime le rouge. Madame tout en rouge peut-être broie-t-elle du noir ? Madame tout en rouge un jour verra-t-elle la vie en rose ?

Un jour, un instant

Ternand. La Rejonière. Jeudi 10 avril. 19 heures 20.
Dans les vignes, un bidon en tôle rouillé. Une belle rouille bleue et orange. Posé dessus, cinq pommes de terre germées. Le jour décline, il fera bientôt nuit.
Depuis combien de temps sont-elles là ? Vont-elles, un jour prochain, voir leurs germes plonger dans la terre pour donner à un homme de nouveaux tubercules ? Ou bien sont-elles condamnées à sécher doucement sur ce beau bidon bleuté ?
Cinq pommes de terre germées, comme les cinq doigts d’une main…

Image © Christophe Renoux

Un jour, un instant

Chapelle de la Salette à Ternand. Fin août et fin d’après midi.
La lumière était belle en cette fin de journée. Je me pressais pour trouver le bon cadrage et la bonne lumière pendant qu’il était encore temps. Il m’importait que l’écart entre la Vierge et la chapelle fasse une belle forme, bien dessinée et délicate. Soudain les nuages se resserrèrent autour du soleil et créèrent une lumière comme on en trouve dans les reproductions de la Vierge, les icônes et les peintures classiques des grands Maitres. Divine lumière !

Un jour, un instant

Cannes. Croisette. Jeudi 30 mai. 18 heures 04.
Fin de journée un peu pluvieuse… Le festival vient tout juste de se terminer. On a déshabillé les fenêtres des maisons de leurs affiches monumentales, le tapis rouge est plié, les stars ont quitté la ville qui reprend peu à peu son visage habituel. Subsistent encore quelques éléments qui rappellent qu’il y a eu un grand évènement. Comme cette chaise rouge et or sur une plage.
Une chaise oubliée. Abandonnée, sans coquillages ni crustacés…

Image © Christophe Renoux

Le parfum de Lou

Paris. Lundi 15 octobre 2012, 16 heures 48, dans les Galeries nationales du Grand Palais.
Exposition « Bohèmes ».
En entrant dans la première salle de cette magnifique exposition mon regard croise celui d’une grande brune presque rousse, à la moue boudeuse. Je reconnais immédiatement Lou Doillon. Belle, belle, belle… Un grand manteau sur une délicieuse robe à fleurs, des bottines noires. Son parfum enivrant me monte aux narines. Une senteur forte, sensuelle, élégante et sauvage.
Quelques tableaux plus tard, je me penche pour savourer de merveilleux détails du  » Joueurs de cartes  » de Nicolas Régnier. Pris par la contemplation de cette œuvre, je me sentais un peu seul au monde lorsque soudain mon nez frétilla de nouveau. La belle à quelques centimètres de moi se penchait elle aussi pour percevoir les mystères du tableau, et voilà que sa longue chevelure auburn caresse mon manteau anglais…
Instant de grâce…
Mais quel est son parfum ? Sans doute une composition de Givenchy, pensais-je.

En sortant de l’exposition, elle s’arrêta pour lire cette ultime citation écrite sur le mur :
« Dieu voit tout, mais il ne dit rien à personne », proverbe Rom.
Mais dis-moi Lou, quel est ton parfum ? J’en ferai presque un tableau.

Un jour, un instant

Quelque part dans un village de la Loire où se trouvent les « Rencontres internationales d’art singulier » pour le week end. Le village s’appelle Marsac en Livradois et c’est dans le Puy de Dôme, non loin d’Ambert, le pays de la fourme.
Les artistes sont venus de loin. Très loin. De Paris, de Bretagne, d’Espagne ou de Pologne. On cherche un peu les lieux pour les trouver. Ils sont 40, on devrait les voir. Le village est désert. Il fait chaud. On dirait qu’il y a eu la guerre ici, il y a quelques jours ou quelques heures. Personne. Même pas un pauvre chat, un chien errant. Non, les rues sont vides. Peut-être pas les bonnes dates ? J’ai raté les dates c’est ça !
Les devantures des magasins d’une autre époque. Un numéro de téléphone à 6 chiffres sur le mur du « TAXI BAR TABAC ». Il devait sûrement y avoir du monde autrefois ici.

Une affichette collée sur la porte de ce qui devait être un café. Elle est là depuis combien de temps ? Elle semble incrustée dans le carreau avec l’aide de la colle d’une autre époque.
Le bottin ! Certainement pour appeler du téléphone noir à cadran à trous qui faisait un bruit mécanique tellement joli pour les oreilles. Un autre temps où le téléphone portable était encore inimaginable.
Il devait y avoir une odeur de civet là-dedans le samedi à midi.

Et soudain, il y eut 3 caravanes d’artistes dans la rue, puis une salle ouverte, puis deux, puis trois. Des œuvres exposées, des univers singuliers… Des amis artistes retrouvés.
Ils étaient bien là les 40 artistes promis. Il y eut du public plus tard dans la journée et le lendemain. Il y eut des rencontres, des échanges et finalement, ils ont été heureux de ces deux jours au milieu de rien.
Comme quoi, il faut se méfier des endroits qui semblent dormir car il peut toujours y avoir des surprises.

Un jour, un instant.

Samedi  7 avril. Paris, Hôtel Jeanne d’Arc, chambre 62. 9 heures et 1 minute.
Avant d’aller découvrir deux magnifiques expositions (« La Sainte-Anne, l’Ultime chef d’œuvre de Léonard de Vinci » et « Degas et le nu ») je reste un bon moment dans cette chambre au-dessus des toits de Paris à travailler sur un petit poème qui sera écrit comme une petite vague autour du menhir en préparation. L’inspiration me fera écrire plusieurs strophes qui me plaisent bien, mais c’est beaucoup trop long. Raccourcir, faire des coupes, tailler dans les mots, faire des choix, des ratures, des brouillons… Je n’aime guère cet exercice pourtant nécessaire.
Et si je laissais ce texte tout entier ?

Image © Christophe Renoux

LA VIE EN ROSE

Un beau matin, sur les rochers rosés des côtes bretonnes
le marin Valentin fut charmé par un étrange chant
Lui apparu alors dans un ciel de nuages blancs
une sirène dont les mélodieuses vocalises rendent aphone

Valentin, envoûté, en eût le corps tout retourné
Il s’envola jusqu’à la belle, déclarant sa flamme en proses
avec légèreté et une poignée de quelques roses
comme si des ailes à son dos avaient poussé

Le marin perdu jeta son dévolu sur cette inconnue
qui ne rejeta pas à la mer cet amour incongru
La légende ne raconte pas ce qu’il advint
on dit qu’on les vit enlacés sur un rocher, un matin

Il n’est point d’amour impossible, n’en déplaise à certains
Chantons en chœur « La vie en rose » pour une douce sirène et son valentin.

Nids

Mardi 15 novembre. Dans mon jardin.

Petit tour au fond du jardin pour nettoyer les maisons des oiseaux pour le printemps prochain.
Surprise du jour, un nid douillet et profond ayant la forme de la maison avec des petits œufs magnifiques qui n’ont pas eu le temps d’éclore.
La maman a du faire une mauvaise rencontre, certainement avec un chat rôdeur. Snif…

Image © Christophe Renoux

 

Un jour, un instant

Image © Christophe Renoux

 

Samedi 15 octobre. Paris, Hôtel Saint-Paul. 8 heures 20.

Dehors, Paris s’éveille mais il n’est pas cinq heures. La vie est déjà bruyante de l’autre côté des fenêtres de l’hôtel.
Douche du matin. Instant de paix et de sérénité. Solitude aquatique en pensant au programme de la journée, avant la foule et le rythme effréné de la capitale qu’on suit malgré soi.
Et puis l’esprit s’en va vagabonder vers d’autres horizons…
Les gouttelettes d’eau perlent sur la peau…
Ça respire le calme ici, juste le bruit de l’eau qui coule sur le carrelage. Mais dans un quart d’heure mes pas rejoindront les milliers d’autres qui courent sur le bitume de la ville.
Prolonger l’instant, encore un peu…

Un jour, un instant

Lundi 15 août. Chamelet (Rhône). 18h05.
Un ancien café fermé depuis longtemps. Au numéro 12, il y a eu une vie ici, autrefois. Des rires, des blagues, des mariages, des deuils, des naissances, des verres qui tintent et des parties de cartes, un lieu de rendez-vous, de longues soirées d’hiver et de frais matins d’été…
Les volets ont été fermés un jour, puis pour toujours. Ils ont pris de la rouille, la plaque « Byrrh » aussi.
Le soleil déclinant met en lumière ce passé évanoui…

Plus loin, une fenêtre fermée de barres d’acier, d’un grillage et de carton entremêlés. Depuis longtemps… Contre le froid, contre l’intrusion éventuelle d’un chat ou d’un voleur, contre la lumière ?
Inventer le passé…

Image © Christophe Renoux