La Comtesse de Castiglione

Fév 12, 2010 | Lecture, Photographie | 0 commentaires

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Voilà une femme exceptionnelle, artiste visionnaire d’une incroyable modernité, mais incomprise en son temps. On salue aujourd’hui son oeuvre artistique, singulière et prémonitoire.

Juillet 1856, la jeune Comtesse de 19 ans pousse la porte du célèbre atelier qui photographie les gens du monde, Mayer & Pierson. Elle reviendra régulièrement se faire tirer le portrait durant 40 ans.
Femme sans doute la plus photographiée de son temps, on sait qu’en 1913, Montesquiou possédait 434 clichés. Il fut ébloui par sa célèbre beauté :
« Je n’oublierai jamais l’émotion qui s’empara de moi le jour où j’appris qu’une femme vivait derrière les persiennes constamment closes d’une certaine encoignure de la place Vendôme et que cette femme était celle dont le nom était synonyme de beauté ».

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La photographie de mode n’existait pas encore et la comtesse de Castiglione invente le genre en se mettant en scène. Elle n’est pas un modèle passif, elle célèbre elle-même son image, de façon inventive, avec des poses inattendues, des vêtements qu’elle dessine et qu’elle crée, des accessoires qu’elle choisit avec grand soin, mettant en valeur son corps et bousculant sans complexe les codes de l’époque pour sublimer son image.

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Un jour elle lance au photographe :
« Avez-vous bien conscience de ce que Dieu accomplit pour vous en vous faisant le collaborateur de la plus belle créature qui ait existé depuis le commencement du monde ? »
Elle donne un titre à chaque photographie. Sous l’un de ses portraits, en 1861, elle copie ces deux vers :
« En voyant la Douleur si belle, Qui pourrait vouloir du Bonheur ? »

Dans les années 1880, elle sombre dans l’anonymat et la neurasthénie, elle s’enferme dans son hôtel situé au 26 de la place Vendôme et ne sort que la nuit, pour ne pas qu’on voit ce que le temps a fait subir à sa beauté.

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Elle finit pas détruire tous les miroirs de son appartement, mais continua de « célébrer chaque jour les funérailles de sa beauté » en posant devant l’objectif.
Alors que personne ne pouvait la voir à la lueur du jour, seuls les photographes avaient droit de regard sur la progression de la vieillesse sur son visage et son corps.
Elle mourut en 1899, à l’âge de 62 ans, et fut inhumée au cimetière du Père Lachaise.

Ces moments de pose n’étaient-ils pas l’essence même de sa vie ? Ne voulait-elle pas tout simplement rendre immortel ce qu’elle avait de plus
précieux, sa beauté, qu’elle voulait ériger au rang d’œuvre d’art ?
A son époque ce comportement était choquant. Serait-il perçu de la même manière aujourd’hui ?
On pense à Cindy Sherman et ses autoportraits obsessionnels, et au travail de Sophie Calle, entre autres…
La comtesse de Castiglione, n’était-elle pas tout simplement en
avance sur son temps ?

Un livre magnifique retrace son parcours photographique avec 130 clichés.

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